Melissa, métier Doula
La grossesse et la maternité sont deux moments extraordinaires de la vie.. Mais ce sont aussi, parfois, deux mondes inconnus, intenses et déroutants. C’est justement dans ces instants-là qu’on réalise combien il est essentiel d’avoir un véritable « village » autour de soi.
Certaines femmes choisissent d’en faire leur métier : accompagner, soutenir, écouter, sans juger. Ce sont les Doulas. Et j’ai eu la chance d'être accompagnée par l’une d’elles pour mes 2 enfants : Melissa
Sa présence bienveillante lors de l’accouchement, son soutien précieux pendant le post-partum, ses conseils sur l’allaitement…
Melissa semble tout maîtriser, avec douceur et humilité.
Elle-même maman de deux enfants, elle incarne cette figure rassurante qu’on aimerait toutes avoir à nos côtés à ce moment charnière de notre vie.
Curieuse d’en apprendre davantage sur ce métier au nom mystérieux, j’ai voulu en savoir plus : que signifie être Doula à l’île Maurice, un pays où les enfants occupent une place si spéciale ? Comment on transforme sa passion en profession ?
Interview avec Melissa
Qu’est-ce qu’une doula, exactement ?
Une doula est une femme formée pour accompagner les mamans, ou les couples, pendant la grossesse, l’accouchement et le post-partum.
Elle n’est ni médecin, ni sage-femme, mais elle offre une présence bienveillante, du réconfort, de l’écoute et de la confiance. Elle apporte un soutien émotionnel, physique et informatif tout au long de cette période de transition.
Comment as-tu découvert ce métier ?
C’est ma propre expérience de maternité qui m’a ouvert les yeux.
Quand j’ai eu mon deuxième enfant, nous sommes entrés en confinement en 2020. C’est à ce moment-là que j’ai pleinement réalisé à quel point le post-partum pouvait être difficile.
J’en ai parlé à mes amies proches, qui m’ont elles aussi confié avoir traversé des moments compliqués. C’est là que j’ai compris combien un accompagnement non médical pouvait faire une réelle différence.
Je me suis alors renseignée sur le métier de doula (il y en avait seulement deux à l’époque à l’île Maurice, l’une en prénatal et l’autre en postnatal).
J’ai trouvé une formation en ligne avec Camille Laperle (Maternité Sacrée), et je me suis lancée dans l’accompagnement du post-partum fin 2021.
En 2024, j’ai complété deux autres formations en ligne avec Julie Toutin (En terre de mères), pour l’accompagnement prénatal et l’allaitement.
Comment se déroule l’accompagnement que tu proposes ?
Je propose un accompagnement très personnalisé, en fonction des besoins de chaque maman ou couple.
Cela peut aller de quelques rencontres prénatales (avec des cours de préparation à la naissance), jusqu’à un suivi complet, incluant ma présence le jour de l’accouchement et un accompagnement en post-partum.
On aborde différents thèmes : les émotions, les peurs, le projet de naissance, la place du partenaire, l’accouchement, l’allaitement, le post-partum, la fatigue, le massage bébé, le portage en écharpe, le bandage du ventre, la reprise du travail, etc.
Comment ce métier est-il perçu à Maurice (par rapport à d’autres pays) ?
Le métier de doula est encore peu connu à Maurice, même si les choses évoluent positivement.
Dans des pays comme la France, le Canada ou les États-Unis, les doulas sont bien mieux intégrées dans le parcours de naissance et en post-partum.
Ici, on se fait connaître surtout grâce aux réseaux sociaux, au bouche-à-oreille, et par les mamans qui recherchent autre chose que le simple suivi médical.
Mais il reste encore du chemin à parcourir pour que l’importance de ce rôle soit pleinement reconnue.
L’île Maurice est multiculturelle. Le vis-tu aussi dans ta pratique ?
Oui, chaque communauté a ses croyances, ses rituels, sa manière d’aborder la naissance. Certaines familles sont très présentes et impliquées, d’autres plus discrètes. Mais ce que je remarque surtout, c’est que le besoin d’écoute, de respect et de sécurité est universel. Quelle que soit la culture, chaque maman a besoin de se sentir entourée. Comme je le dis toujours aux couples que j’accompagne :
« Il faut tout un village pour élever un enfant. »
Quel est, selon toi, le plus grand besoin des femmes enceintes à Maurice ?
Le besoin d’être entendues et respectées dans leurs choix.
Trop souvent, les femmes se sentent coupables si elles sortent du cadre.
Chaque grossesse et chaque accouchement est unique : il faut arrêter de penser qu’il n’y a qu’une seule bonne façon de faire.
Comment qualifierais-tu les mamans mauriciennes ?
Des mamans poules 😊
Elles sont très investies, très présentes.
Les femmes enceintes sont-elles bien accompagnées par leur entreprise ?
Non, pas suffisamment.
Il y a un vrai manque de flexibilité autour de la grossesse et du retour au travail : peu d’aménagements de poste, un retour souvent précipité, et aucun soutien émotionnel.
Par exemple, une maman qui allaite a droit à une heure de moins par jour (soit le matin, soit l’après-midi), mais il n’y a aucune salle dédiée pour tirer son lait, ni frigo pour le stocker.
NB : Les choses évoluent dans le bon sens. Le congé maternité, initialement de 12 semaines, est passé à 16 semaines. Certaines entreprises ont commencé à mettre en place des horaires/jours flexibles lors de la reprise du travail.
La véritable différence avec l’Europe réside dans la période prénatale, où la femme enceinte travaille souvent jusqu’à son terme.
La famille occupe une place centrale à Maurice. Qu’est-ce qui l’explique selon toi ?
C’est culturel.
À Maurice, on vit souvent dans des structures familiales élargies, où les grands-parents, oncles et tantes sont très présents. Et puis, c’est une petite île, donc les liens sont forts.
Mais cela peut aussi être source de stress pour certaines mamans, qui ont du mal à poser leurs propres choix.
Et à l’inverse, être une femme sans enfant, ou ne souhaitant pas en avoir, est-ce accepté ?
Pas toujours.
Il y a encore beaucoup de normes sociales autour de la maternité.
« Tu ne veux pas d’enfant ? Mais tu es heureuse sans enfant ? Pourquoi tu ne veux pas ? »
C’est dommage, car chaque femme devrait pouvoir choisir librement son chemin, sans jugement.
Enfin, quels conseils donnerais-tu à une jeune maman ?
Je lui dirais : fais-toi confiance, tu fais de ton mieux.
Entoure-toi de personnes qui te soutiennent, qui t’écoutent et respectent tes choix.
Et surtout, prends soin de toi aussi.
Je le répète souvent aux couples que j’accompagne :
« Une maman qui va bien = un bébé et une famille qui vont bien. »
Pour suivre les bons conseils de Melissa et la contacter rendez vous sur sa page Insta.




